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Ma vie autour de l'éreutophobie
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11 décembre 2010

2008-2010

Nous sommes fin 2010.

L'éreutophobie n'est pas le seul élément ayant affecté mon adolescence et gâchant actuellement ma vie d'adulte. Mais elle reste l'un des deux fardeaux les plus lourds que j'ai à porter.

Je suis une personne réservée et timide. Je rougis très facilement et intensément. Je n'ose jamais aller voir (par exemple courir aux wc pour me regarder dans le miroir et constater à quel point je rougis). Mais je le sais car j'ai osé demandé deux ou trois fois à des amis proches. Je le sais également grâce à l'absence de tact de certaines personnes qui ne se lassent jamais de dire: "olala mais t'es tellement rouge que tu clignotes !" "t'es rouge comme une pivoine !", ainsi que d'autres phrases qui ont le don de me mettre carrément mal à l'aise et de faire empirer l'effet de "flush"...

J'évite les sorties au maximum. Lorsque je sors, je suis tellement mal à l'aise que je me prends parfois des réflexions comme: "pourquoi tu ne souris pas ?" "tu fais la gueule ?". Malheureusement, ces remarques ne font qu'empirer les choses et me donnent encore plus envie de rentrer chez moi. Ce n'est pas que je ne suis pas heureuse, c'est que, pendant que les gens autour pensent à s'amuser, moi je pense au fait que je dois contrôler mes tics (mon autre fardeau) et mes rougissements. Je pense que je ne dois pas attirer l'attention sur moi alors je me fais toute petite. Mais, malheureusement, ça fait toujours l'effet inverse car une fille qui reste dans son coin pendant une soirée, ça se voit direct, tout autant que la fille bourrée qui danse sur la table...

Bref, à force de soirées sous pression (rien à voir avec la bière), je refuse de plus en plus d'invitations et ne fais que quelques soirées chez moi, en tout petit comité. Mais là, encore, même entourée d'amis très proches, dès que plus d'une personne me regarde quand je prends la parole, je rougis et c'est l'enfer... Alors, même ces soirées restent rares.

Je n'ai pas toujours rougi, du moins, soit pas à ce point, soit j'étais trop concentrée sur mes tics pour m'en rendre compte. Honnêtement, je ne saurais pas dire quand ça a commencé, ni si cela a empiré ou si c'est moi qui m'en suis rendue compte et qui l'ai de moins en moins bien vécu. Toujours est-il que j'étais déjà réservée et très mal dans ma peau, à cause des tics. Le fait de rougir, n'a fait que s'ajouter, ou plutôt se conjuguer avec les tics... Je pense même qu'à force d'apprendre à maîtriser ces derniers, les rougissements ont pu prendre tout la place qu'ils souhaitaient et, au final, j'ai diminué un problème pour en voir débarquer un autre. On devrait dire "un problème peut en cacher un autre", au lieu d'un train... !!

Au plus loin que je me souvienne, concernant l'importance des flushs, cela remonte à trois ans, lorsque je suis allée vivre en Ecosse. Je vais en parler plus bas. Avant cette période, je me souviens avoir rougi fréquemment et me l'être fait remarquer tout aussi souvent mais, même si cela m'a affectée, je n'ai pas l'impression que cela a gâché des moments car je les gâchais autrement... Mais, je ne veux pas m'étaler là-dessus...

Disons tout simplement qu'avant de partir en Ecosse, j'ai eu des années difficiles pendant lesquelles je me foutais un peu de ce qui pouvait m'arriver. Je me souviens qu'une copine dans le métro faisait exprès de me mettre mal à l'aise pour me faire réagir. Psychologie inversée de m..de puisque ça avait l'effet inverse: j'étais encore plus mal dans ma peau. Bref, le fait de quitter la France m'a permis de prendre confiance en moi et de sentir une petite brise d'aventure et de, pourquoi pas, réussite. Je crois que le fait de rougir a commencé à me peser quand j'ai pris ma vie en main et que j'ai cessé de la détester.

Parlons-en, justement, de l'Ecosse. J'y ai vécu deux ans pour travailler à IBM, dans un centre d'appels. Ce serait bien long de décrire tous les moments où il m'est arrivé de rougir mais je vais quand même essayer pour permettre à des lecteurs de se reconnaître dans mon témoignage.

Très rapidement, j'ai eu quelques responsabilités au travail. Je me sentais à l'aise avec les procédures et je pense avoir été une employée de qualité (mmh cette absence de confiance en moi m'incitant à dire "je pense avoir été"...). Je me souviens d'une "task" que je devais gérer en même temps qu'une collègue avec qui j'avais des différents concernant la façon de travailler. Bref, sans aller dans les détails, notre team leader nous a réunies, avec une autre collègue. Chacune a pris la parole à tour de rôle afin de donner sa version, sa façon de voir les choses, et de proposer une solution, un terrain d'entente. Je m'en souviens comme si c'était hier: je portais une casquette. Au début, j'essayais non pas de les regarder dans les yeux (ça, je n'ai jamais pu le faire) mais en tout cas, de regarder dans leur direction. Mais je me suis très vite sentie mal à l'aise car la chaleur au niveau du visage est rapidement montée au bout de quelques mots que j'avais prononcés. Le reste de mon discours s'est fait ainsi: les yeux fixant la moquette et la visière de la casquette me cachant le visage au mieux, afin qu'on ne voit pas que je rougissais. La chaleur sur les joues était insoutenable et j'ai dû couper court à mes propos pour simplement sortir de cet enfer. La réunion s'est achevée sur un amer goût de frustration car j'avais simplement abandonné mes principes et laissé l'histoire ne pas se régler...

Il y a eu d'autres fois où cela m'est arrivé de rougir intensément, surtout avec mes team leaders. Avec les collègues aussi, quand plusieurs me regardaient, quand ma chef me parlait depuis son bureau et que les autres nous écoutaient et regardaient. Il y a eu aussi une fois où une collègue s'est levée et s'est postée devant moi en criant à tous mes collègues que je l'avais dénoncée (en fait, pour faire court, j'avais juste eu un client mécontent qui voulait porter plainte et j'avais donc tout logiquement, prévenu ma team leader qu'il y allait y avoir un dépôt de plainte). Je n'ai donc pas su me défendre contre cette personne, non pas que j'avais peur d'elle (au contraire, je n'avais absolument rien à me reprocher dans cette histoire). Mais j'avais tellement peur de me mettre à rougir et de passer alors pour une menteuse ou autre, que j'ai juste fermé ma gueule...

Pour finir, j'ai très envie de parler du jour de mon départ. Lorsque j'ai quitté IBM pour de bon. J'ai fait la bise à mes collègues. J'étais très heureuse de partir mais certaines personnes allaient me manquer alors je voulais profiter de ces derniers instants. J'ai donc fait ma petite tournée, disant au revoir à chacun. On m'a offert des cadeaux, j'ai senti la chaleur dans mes joues mais j'étais trop émue pour y prêter attention. Et puis, une amie et collègue s'est mise à applaudir et là, je me suis sentie rougir. Tout le monde a suivi et mon équipe entière s'est mise à m'applaudir, comme on le faisait à chaque départ. Il faut que je précise que le centre d'appels est une salle immense avec des centaines de bureaux sans cloisons, juste des petits panneaux entre chaque. Donc, tout le monde pouvait me voir là, debout comme une idiote, à rougir comme une tomate et regarder le sol.

Le pire, à ce moment-là, c'est le combat contre moi-même, que j'ai perdu... Une partie de moi, celle qui se serait montrée si je n'avais pas ce problème de rougissements, avait envie d'en profiter à fond. Car, après tout, j'avais fait du bon boulot et, même si j'avais eu des hauts et des bas que ce soit moralement ou relationnellement, j'allais être difficile à remplacer. Donc, cette partie de moi, la vraie moi en fait, avait envie de faire une révérence, de délirer, de dire "merci merci". J'avais même eu à ce moment-là, la soudaine envie de me faire un délire genre remerciements façon Oscars (Je voudrais remercier mes parents sans qui je n'aurais pas pu payer mon billet d'avion, etc etc...). Bref, ce moment aurait dû être un moment agréable, drôle, émouvant, un bon moment quoi. Au lieu de ça, c'était atroce, je me suis surprise à détester, pendant un court instant, ma collègue à l'origine de ces applaudissements. Je lui ai même jeté un regard noir, je m'en souviens car, juste après, je m'en suis voulu. Bref, c'était juste horrible alors j'ai tourné les talons, j'ai marché vite, en regardant par terre et je suis partie, comme une voleuse...

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